Une brise d'air me réveille, mon odorat émerge par la même occasion, ça sent l'herbe fraîche, et le printemps. Au toucher, j'ai l'impression d'avoir la tête dans un coussin, mais c'est en faite de l'herbe qui me sert d'oreiller. J'ouvre les yeux, et me retrouve face à une fleur...
Marcher le long d'une route, marcher tout droit à travers les champs, marcher au milieu de nul part, marcher un sac sur le dos, marcher... S'arrêter et regarder les alentours, le soleil, la verdure, le ciel bleu, aucun nuage. Regarder le sol, ah oui le sol sur lequel mes pieds reposent, ce sol qui est toujours là pour amortir ma chute quand je tombe, le sol... Et une pierre! Un galet pour être précis. Je le ramasse, je l'examine, un simple galet, je regarde l'horizon et je lance le galet le plus loin possible et je continue ma marche, je continue de marcher le long de cette route, je continue de marcher tout droit à travers ces champs, au milieu de nul part, mon sac sur le dos. Je m'arrête quelques secondes plus tard, je regarde le sol, je retrouve ce galet devant mes pieds, je le reprends souriant, et je le relance, et je reprends ma route, je reprends mon chemin.
Je m'arrête de nouveau, il est encore là devant moi, ce n'est pas possible! Je me baisse, le prend dans ma main, et de colère je le jette le plus fort et le plus loin possible! Et énervé, je continue ma route d'un pas décidé, avant de m'arrêter rapidement car je le retrouve de nouveau à mes pieds, j'ai l'impression qu'il me regarde, qu'il me fixe, qu'il m'en veut! Je n'en peux plus, je le ramasse encore et encore, et je me retourne, et je le lance dans la direction de ma venue. Avant de continuer mon chemin... Et de retomber une énième fois sur ce galet! Il me suit, j'en ai peur! Cette fois-ci, je me mets à courir pour avoir une chance de lui échapper, je me mets à courir quelques minutes à pleines puissances, les pensées défiles dans mon cerveau, et puis un peu essoufflé, je commence à ralentir, je me retourne et je le vois arrivant à la vitesse de la lumière, je le vois arriver dans ma tête, et "poc", je me m'écroule sur l'herbe de ce chemin, et puis le néant...
Du vent frais, dans cette chaleur torride, ça fait du bien, c'est agréable, j'ouvre lentement les yeux, et ce que j'y vois, c'est l'apocalypse, le ciel est gris, du brouillard, le sol n'est qu'un énorme rocher brûlant et fumant, pas de végétation, pas de vie à l'horizon, c'est un désert, suis-je seul? Je me lève tant bien que mal, j'ai mal à la tête, et puis je regarde à mes pieds, il n'y a plus de galet, mais un énorme gouffre, dont on ne voit pas le fond... Pas de lave, je ne suis pas au bord d'un volcan. Mais le vertige me prend, non il ne faut pas que je tombe, je dois lutter et basculer en arrière pour ne pas me laisser aller en direction du vide.
Et je tombe sur mes fesses, je suis complètement déboussolé, où suis-je? Une goutte de sueur au front, les bras croisées sur mes jambes repliées, je regarde dans le vide, ma pensée s'arrête, je n'ai plus de pensée, je ne pense plus, je ne sais même pas si j'ai pensé un jour... Une légère brise balaye mes cheveux, et je reprends mes esprits, me relève et je marche, le long du gouffre, je marche jusqu'à trouver de l'aide.
Mes vêtements sont déchirés, j'ai soif, je suis épuisé, le paysage est toujours le même, gris, brouillard, roche, et le gouffre est toujours là à mes côtés, j'ai marché combien de kilomètre à côté de ce vide, sans jamais y voir de fin? Mais y'a-t-il une fin au moins? Je m'écroule sur le sol, exténué, je pleure, mes larmes descendent le long de mes joues, des larmes sales, pleine de poussières. Qu'est-ce qu'il m'arrive? Qu'ai-je fait pour mériter ça? Est-ce la fin du monde? L'apocalypse? Un cauchemar?
Je me mets sur le dos, regardant la grisaille du brouillard, ce nuage de tristesse. Une touffe d'herbe à côté de ma tête, peut-être y'a-t-il encore de l'espoir. De l'espoir... Oui... Il m'en faut pour continuer dans ce monde. Se relever et se remettre en marche, peut-être j'y trouverai une réponse, se relever et se remettre en marche, peut-être j'y trouverai ma réponse... Je baisse ma tête et je vois sortir du sol, un diplopode. Je le vois regarder autour de lui, examiner les alentours, je le vois, et je me dis qu'il y a de l'espoir et de la vie. De l'espoir? Oui! De l'espoir! Tout n'est pas fini, rien n'est fait, je ne suis pas mort, il reste de l'espoir, et je me mets à courir le long de ce gouffre, je me mets à courir avec hâte de sortir de cet enfer, je me mets à courir et des pierres se cassent le long de se ravin, des pierres se cassent sous mon pied droit, et me font chuter dans le vide, je tente de me rattraper au bord, mais en vain, je chute dans le vide, face au ciel, dos à la descente, je chute lentement et longuement, je chute à tout jamais dans les abysses...
Et les ténèbres m'engloutirent, au plus profond de moi-même...